Huile sur panneau de chêne. Ecole flamande vers 1600, entourage de Marten van Cleve.
Notre composition met en scène une fête paysanne, probablement les fiançailles de la jeune femme à droite vers laquelle tous les regards sont tournés. Tandis que l’on danse au son de la seule cornemuse dans les compositions de Pieter Brueghel l’Ancien, c’est avec l’harmonie d’une vielle (au centre) et d’une cornemuse (le joueur est assis de dos sur une barrique à droite) que nos paysans forment une farandole. Ces moments de liesse sont l’occasion de rompre avec la monotonie des activités laborieuses faisant oublier une condition misérable, les vêtements en lambeaux ainsi que les semelles décollées des chaussures en témoignent. De plus, ces fêtes constituent l’indispensable exutoire qui aide à supporter les calamités que la guerre de Quatre-Vingts Ans (1568 – 1648) laisse derrière elle dans les Pays-Bas méridionaux. La consommation excessive de vin et de bière et l’ivresse y sont dépeintes de manière crue ; ici un homme attablé ivre vomit et là une femme engloutit une outre pleine à l’arrière-plan. Dans notre tableau, le mode de représentation des festivités se rattache à l’univers de Marten van Cleve et, de manière assez habile, notre peintre rehausse sa palette terreuse par des touches de couleurs vives sur les vêtements des protagonistes.
Si Pieter Brueghel l’Ancien est le premier à peindre des scènes de paysans dansant et buvant, il n’est pas à l’origine du genre dont la source se trouve dans l’art de l’estampe sous l’impulsion de Sebald Beham (1500 – 1550) et d’autres graveurs allemands dans les années 1520/30. Pieter van Cleve, Pieter Balten et Pieter Brueghel le Jeune lui emboiteront le pas. Hans Bol, Jacob I Savery, David Vinckboons et bien d’autres suivront, le genre se perpétuant jusqu’à la fin du Siècle d’Or.
Un fort cadre à profil renversé en bois noirci vient souligner notre scène festive.
Dimensions : 51,5 x 68,5 cm – 67 x 84 cm avec le cadre
Biographie :
Marten Van Cleve (Anvers c. 1527 – Id 1581) appartient à une famille de peintres anversois. Il est le fils de Willem van Cleve l’Ancien et le frère de Hendrick III van Cleve et Willem van Cleve le Jeune. D’abord formé par son père, il aurait, selon Karel van Mander, étudié auprès du grand Frans Floris, principal peintre d’histoire flamand du milieu du XVIe siècle. Marten van Cleve ne fait pas le voyage en Italie, son œuvre n’est ainsi pas influencée par le maniérisme italien. Ses sujets de prédilection sont les scènes de la vie quotidienne, les mariages et les danses paysannes, les kermesses, les scènes de bagarre ou de pillage. Seules cinq de ses peintures étant signées et documentées, l’attribution de ses autres œuvres est rendue difficile. Même certaines attributions du Dr. Klaus Ertz dans son catalogue raisonné de Marten van Cleve sont remises en cause.
Bibliographie :
– Ouvrage collectif, Fêtes et Kermesses au temps des Brueghel, catalogue de l’exposition au musée de Flandre de Cassel, Snoeck, 2019
– ERTZ, Klaus et NITZE-ERTZ C, Marten van Cleve (1524 – 1581) Kritischer Katalog der Gemälde, Lingen, 2010
– GIBSON, W. S., Pieter Brueghel and the Art of Laughter, Berkeley, 2006
– A. G. STEWART, Before Bruegel. Sebald Beham and the Origins of Peasant Festival Imagery, Aldershot, 2008
– HAAG, Sabine, ouvrage collectif ( OBERTHALER Elke, PENOT Sabine, SELLINK Manfred, SPRONK Ron), Bruegel The Master, Thames & Hudson, 2018
– DUCOS Blaise, Fêtes et célébrations flamandes, Brueghel, Rubens, Jordaens, catalogue de l’exposition au Palais des Beaux-arts de Lille, RMN, 2025
